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Par pulsatilla le 16 Mars 2024 à 06:00
Pour les trois samedis qui viennent , nous allons célébrer le Printemps .
Alors que nous nous extirpons du long tunnel gris de l'hiver , j'ai choisi un tableau dynamisant qui chante la lumière et les couleurs retrouvées , la force de la nature qui ressuscite , les arbres dans leur splendeur , la joie de vivre .
Paul Signac ( 1836-1935 ) autodidacte aisé , homme de son temps , avait trente-trois ans quand il a peint ce tableau et toute la fougue de la jeunesse . S'il avait au départ été influencé par Monet il avait ensuite adhéré complètement au pointillisme de Seurat : juxtaposer des points pour reconstituer une couleur principale et des formes par une sorte d'illusion d'optique
Paul Signac . Arbres en fleurs ( amandiers ) . 1896 .
Signac avait fait en 1893 l'acquisition d'une maison à Saint-Tropez où il invitait de nombreux peintres , contribuant ainsi à la renommée naissante de ce petit port .
D'où sans doute ce décor marin avec au fond des rochers qui ressemblent à ceux de l'Estérel .
J'aime ces larges touches aux couleurs brillantes qui donnent au tableau une allure de mosaïque .
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Par pulsatilla le 9 Mars 2024 à 00:04
Aujourd'hui j'ai choisi un tableau où le vase est représenté tel un personnage et il est lui-même mis en valeur par la pièce lumineuse où il se trouve .
C'est une oeuvre peu connue d' Henri Matisse ( 1869-1954 ) .
Vase de fleurs et citrons . 1924 .
Museum of Fine Arts . Boston .
Il y a une telle luminosité dans ce tableau , une telle allégresse que le bouquet où les fleurs ne font qu'un avec le vase , semble lui aussi participer à l'allégresse : bien campé , droit comme un i , les mains sur les hanches on dirait qu'il vit et respire l'air qui arrive par la fenêtre ouverte sur une Méditerranée étale et baignée de soleil . Petit clin d'oeil malicieux, la tapisserie aux tons chauds semble multiplier des bouquets .Le voilage blanc , brodé , ajoute une discrète note de raffinement déjà perceptible dans la forme du vase .
C'est mon ressenti , peut-être ne le partagerez-vous pas ...
Voici maintenant , dans un esprit très différent , un tableau d'Auguste Renoir (1841-1919 ) .
Bouquet de tulipes dans un vase blanc .
Un opulent bouquet de tulipes multicolores toutes fraichement cueillies .
Si je l'ai choisi c'est pour le vase en céramique qui est tout à fait en harmonie de teintes avec le bouquet et qui a la particularité de sembler les maintenir par un lien , comme si ce bouquet était un présent tout juste offert avec amour.
Enfin , je n'ai pas pu m'empêcher de terminer par un des merveilleux vases d'Emile Gallé (1846-1904) exposés au musée d'Orsay .
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Par pulsatilla le 2 Mars 2024 à 00:03
Le bouquet...
Il y a beaucoup de peintres qui ont merveilleusement traité ce sujet .
Mon choix va refléter mes goûts personnels :je préfère de beaucoup regarder et respirer les fleurs vivantes plutôt que les voir doucement mourir dans un vase , même si elles composent de poétiques tableaux avec les jeux de la lumière sur leurs pétales et les reflets dans la transparence du vase qui les contient , lui même souvent très esthétique pour les mettre en valeur .Chez moi les bouquets sont des bouquets secs , qui peuvent être eux aussi très gracieux .C'est le privilège émouvant qu'ont certains végétaux de rester beaux , d'une autre manière , bien après leur floraison . Et ce pied-de-nez à la décrépitude n'est pas déprimant comme une fleur qui se flétrit .
Mais je dois reconnaître que le bouquet sec n'a pas inspiré les peintres !
J'ai cependant trouvé ce tableau qui m'a séduit par son éclat .Ces carlines qui retiennent la lumière semblent sourire à qui les regarde et dégagent une impression de force et de sérénité .La cruche ornée de fleurs rouges est en harmonie avec la rusticité de ces fleurs , outre qu'elle y ajoute une touche de gaieté .
Les carlines . Aimé Victor Barraud . 1940 .
Aimé Victor Barrau était un peintre suisse (1902-1954 ) , d'une famille de graveurs sur boitiers de montres .
Il s'est limité à un petit nombre de sujets ( portraits, autoportaits , nus , natures mortes et quelques rares paysages.
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Par pulsatilla le 23 Février 2024 à 23:48
Aujourd'hui mon choix s'est porté sur un peintre peu connu que la mort alors qu'il n'avait que 33 ans a arraché à une carrière qui s'annonçait prometteuse .
Gabriel Deluc .1910
La danse (ou la danse au Bois Sacré )
Huile sur toile 192x250 cm .
Gabriel Deluc est né en 1883 à Saint-Jean-de-Luz .
Montrant très tôt des dons pour le dessin et la peinture , il étudia à l'Ecole des Beaux Arts de Paris .
De 1904 à 1912, il intégra la fameuse Ruche où étaient accueillis de jeunes artistes désargentés .Quelques cent quarante ateliers étaient mis à leur disposition et il y avait là une extraordinaire effervescence artistique .Chagall , Soutine , Zadkine , Modigliani , entre autres , y ont séjourné .
Dès 1906 il exposa au Salon de Paris où il fut distingué .Il y exposa ensuite régulièrement , puis au Salon des Indépendants .et en 1912 dans sa ville natale ; en 1913 à Paris à la galerie Devambez .
Ce grand tableau , la Danse que je vous présente a été exposé au Salon des Artistes en 1910 . Il sera acheté par Edmond de Rothschild et offert à la ville de Bayonne .
En 1914 , le peintre , qui venait de se marier l'année précédente , s'est engagé volontairement comme infirmier , puis il rejoignit des combattants .Il fit d'ailleurs quelques croquis dans les tranchées . Il fut tué en septembre 1916 .
Quelques unes de ses oeuvres sont exposées au Musée Bonnat et Helleu de Bayonne , d'autres à Saint-Jean-de-Luz .Il y en a une au Musée d'Orsay mais actuellement on n'arrive pas à remettre la main sur beaucoup d'entre elles .
Le compositeur Maurice Ravel qui lui avait acheté un tableau ( Daphnis et Chloé) lui a dédié La Forlane (1917) , troisième pièce de son Tombeau de Couperin ).
Gabriel Deluc s'est à plusieurs reprises inspiré de la danse (dans son tableau Le lac par exemple .)
Il vivait à l'époque de la célébrité éclatante d' Isadora Duncan qui dansait à peine vêtue de quelques voiles et dont l'art était un hymne à la beauté et à l'harmonie du corps .Elle était férue d'hellénisme et de mythologie et ses chorégraphies étaient empreintes de rêve et de mystère .
On retrouve cela dans ce tableau et dans cette danse insolite dans une clairière , énigmatique , gracieuse et nimbée de lumière , devant quelques femmes en longues robes blanches , au son de la flûte .
Nous étions à l'époque de Symbolisme .
Le célèbre ballet Daphnis et Chloé fut représenté à Paris au Châtelet en 1912.C'était une commande faite à Maurice Ravel par Diaghilev . Ce sont les danseurs russes qui dansèrent ce ballet avec parmi eux Nijinski .Toute une époque ...
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Par pulsatilla le 17 Février 2024 à 00:18
Pour illustrer ce thème de la danse , j'ai choisi un tableau du peintre et gaveur norvégien Edvard Munch ( 1863- 1944 )
La danse de la vie . 1889 .
126x 190,5 cm .
Ce tableau est plein de vie et de mouvement , les couleurs sont vives , la lune fait jouer ses reflets sur les robes des femmes mais bien qu'il s'agisse d'une scène de danse champêtre , où les personnages devraient prendre du plaisir , un sentiment de malaise se dégage de ce tableau .
Munch l'a peint dans un moment de crise intense où il cherchait à fuir sa compagne d'alors . Il s'était réfugié dans un sanatorium parce qu'il n'y connaissait personne .
La scène se passe sur un pré en bord de mer .L'eau prend sa teinte nocturne , on imagine le douceur du soir , la lune , vermeille , semble s'être approchée des danseurs et leur souhaiter la bienvenue en étendant les bras ...
Une jeune fille souriante , blonde et rose , tend les mains vers une fleur et semble attendre avec une confiance joyeuse celui qui apparaitra pour l'inviter à danser .. Un peu plus loin , lui faisant face , une femme plus âgée vêtue de noir se tient raide , les mains jointes et crispées , le visage émacié , les commissures tombantes et les yeux pleins de rancoeur . Entre les deux femmes , un couple danse et joue le jeu , comme l'indique le bas virevoltant de la robe rouge , mais sans allégresse . La femme fixe l'homme et cherche à lire dans son regard tandis que lui , livide , esquive et fixe sa bouche avec une expression désabusée .Elle a des cheveux roux qui se terminent en pointes dirigées vers son partenaire .Ce couple représente-t-il le peintre et sa compagne du moment ? Il y en a d'autres . L'un danse de manière endiablée , et pour ce qui est de celui qui est près de la femme en noir, l'homme très excité et grotesque serre contre lui en l'étouffant un peu la femme qui semble avoir envie de se dégager de cette étreinte pesante .
A l'arrière -plan d'autres couples dansent de manière endiablée ." Captivés par le magnétisme érotique de la colonne lunaire " , selon Wikipedia ...?
Chacun lit le tableau à sa manière .Pour moi il y a il y a dans ce tableau une distorsion entre la douceur de la nature et cette agitation humaine bruyante , tourmentée et dérisoire où chacun en fait est seul , cherche à l'oublier et y réussit - ou pas . L'amour commence par le rêve et finit fatalement dans la désillusion , c'est ce que le peintre semble exprimer ici .
Ce tableau fait partie d'une Frise de la Vie : la naissance de l'amour , le développement et la disparition de l'amour , l'angoisse de vivre et la mort .
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Par pulsatilla le 9 Février 2024 à 23:55
Aujourd'hui , j'ai choisi un couple mythologique très célèbre : Pygmalion et Galatée .
Selon la version retenue par Ovide dans ses Métamorphoses , Pygmalion était un roi de Chypre qui devint amoureux d'une statue d'ivoire qu'il avait ciselée lui-même . "Souvent il approche les mains du chef d'oeuvre pour s'assurer si c'est là de la chair ou de l'ivoire .Il donne des baisers à sa statue et il s'imagine qu'elle les lui rend ; il lui parle , il la serre dans ses bras [---] ; tantôt il caresse la bien-aimée , tantôt il lui apporte ces cadeaux qui plaisent aux jeunes filles [---] .Le jour étant venu où la ville de Chypre célèbre Vénus , il implora les dieux de lui trouver une femme semblable à la vierge d'ivoire . Vénus qui avait entendu cette prière eu pitié de lui .Lorsqu'il revint chez lui , il s'aperçut que la statue était vivante . "L'amant reste saisi , il hésite à se réjouir , il craint de s'être trompé ;il palpe et palpe encore l'objet de ses désirs ; c'était bien un corps vivant : il sent des veines palpiter au contact de son pouce [---] Sa bouche presse enfin une bouche véritable , la jeune fille a senti les baisers qu'il lui donne et elle a rougi .Levant vers la lumière un timide regard, elle a vu en même temps le ciel et son amant ." Il l'épousa et ensemble ils eurent une fille .
Anne Louis Girodet (1 767-1824 ) Pygmalion amoureux de sa statue . (entre 1813 et 1819)
( Dernière oeuvre du peintre )
Girodet s'exprimait ainsi à propos de ce tableau : "Pour vous donner l'idée de la difficulté principale que je me suis imposée , figurez-vous une femme très blonde , toute dans le clair et se détachant décidément en demi-teinte sur un fond plus clair , avec l'effet du passage , le plus doux qu'il m'ait été possible de le faire, de la partie animée è celle qui est encore de marbre ."Et le challenge est réussi ; on voit bien la différence de carnation entre Cupidon et la statue qui s'éveille à la vie .
On lit sur le visage du sculpteur un mélange d'adoration et de surprise , il n'ose croire que cette sublime créature lui appartienne d'où le geste de sa main droite .Il n'ose pas non plus se redresser de peur qu'un geste brusque ne l'effarouche .La statue prend conscience que la vie lui est donnée et elle esquisse un premier sourire tandis que ses joues rosissent .Son corps a encore la blancheur et la pureté marbre .
Girodet était un disciple de David mais il a cultivé un art personnel , avec une grande maîtrise de la lumière .On voit ici que s'il est très néoclassique (recherche de la beauté idéale , culte de l'Antiquité ) il se montre aussi précurseur du mouvement romantique dans le rendu de l'exaltation de son personnage .
Si j'ai choisi Pygmalion c'est aussi au regard de l'actualité et de la dénonciation qui vient d'être faite du comportement qu'auraient eu certains cinéastes envers de jeunes actrices .
Le fantasme pour l'artiste de créer une femme selon ses désirs peut mener à des dérives : l'emprise et ses perversités .
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